12/07/2018
ECRIVAINS ET... RATURES
Ah ! ces satanées corrections ! En auront-elles provoqué des nuits blanches, de longues heures passées à chercher le mot juste, le synonyme, la formule qui allègera cette phrase alourdie au point de faire pâlir sur leurs pages des écrivains tels que Balzac, Flaubert et bien d'autres...
Balzac, l'auteur de la Comédie Humaine, Hercule de la littérature "a donné l'exemple du travail le plus acharné, le plus colossal, le plus invraisemblable qu'un homme de lettres ait jamais réalisé. [...]
Balzac rédigeait facilement, sans hésitations, sans retouches. Lorsqu'il se relisait, son esprit en ébullition n'apercevait pas grand'chose à refaire. Il envoyait donc son manuscrit à l'éditeur. Celui-ci lui adressait une épreuve. Alors commençait l'horrible labeur. Dégrisé par l'imprimerie, Balzac était obligé de faire sur les épreuves la refonte qu'il n'avait pas faite sur le manuscrit. Il remaniait son livre d'un bout à l'autre et arrivait à corriger son style autant que les plus exigeants prosateurs. Il croyait en avoir fini ; une deuxième épreuve amenait la même désillusion.
Il en épuisait ainsi une douzaine, et cette besogne dura vingt ans ! Il se perdit un jour dans les corrections d'Eugénie Grandet, tomba dans une crise de désespoir et voulut brûler les meilleures pages du livre." (Antoine Albalat).
"Balzac" par Maxime Dastugue d'après Louis Boulanger.
Voyons maintenant les tortures qu'infligeaient à Flaubert les corrections de ses textes :
"Flaubert a incarné le travail. Aucun artiste n'a été plus longuement supplicié par les délices du style. C'est le Christ de la littérature. Pendant vingt ans il a lutté contre les mots, il a agonisé devant les phrases. Il est mort foudroyé, la plume à la main. Son cas a été légendaire. Tout a été dit là-dessus. Sa soif de perfection, ses cris d'angoisse, l'unité magnifique de cette existence exclusivement vouée au culte de l'art, ont fait l'objet de nombreuses études, et resteront à jamais pour la critique un sujet d'admiration et de pitié. Tous les grands écrivains ont travaillé. Celui-ci s'est tué à la tâche."
(Bibliographie : Le Travail du Style enseigné par les corrections manuscrites des grands écrivains par Antoine Albalat. Ouvrage couronné par l'Académie française (Prix Saintour). Librairie Armand Colin, Paris, 1921).
Portrait de Gustave Flaubert par Eugène Giraud.
16:53 Publié dans Vagabondages littéraires et artistiques | Tags : corrections littéraires, balzac, flaubert | Lien permanent | Commentaires (0)
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