12/10/2012
"APOLLON VAINQUEUR DU SERPENT..." DE DELACROIX
"Apollon vainqueur du serpent Python" de Delacroix
Quand Eugène Delacroix apprend que la tâche grandiose de terminer le décor de la voûte dans la Galerie d'Apollon, au Louvre, lui est confiée, rapidement il conçoit le projet d'"Apollon vainqueur du serpent Python". Cette œuvre (1850-1851) ornera le plafond du centre.
Apollon, surgi du cœur d'un embrasement solaire, debout dans son char entraîné par quatre chevaux emballés, décoche ses flèches vers le serpent Python agonisant dans les ténèbres et les eaux du Déluge. Le serpent, se tordant furieusement en replis gigantesques, entouré de monstres et des cadavres de ses victimes, crache une épaisse fumée noire.
À l'opposé, parmi les déesses et les dieux, dont Vénus, Minerve, Mercure, Hercule, certains observent le combat tandis que d'autres se précipitent vers Apollon. Au-dessus du char d'Apollon et d'un halo de feu, la Victoire semble planer dans un ciel embrasé aux côtés de la messagère des dieux, Iris, qui déploie une écharpe pourpre.
Baudelaire témoigne ainsi du travail acharné de Delacroix pour achever ses fresques :
"Dans les dernières années de sa vie, tout ce que l'on appelle plaisir en avait disparu ; un seul, âpre, exigeant, terrible, les ayant tous remplacés, le travail, qui alors n'était plus seulement une passion, mais aurait pu s'appeler une fureur."
(Écrit par Améthyste)
"Apollon vainqueur du serpent Python" (1850-1851) d'Eugène Delacroix.
(Description : Français : Palais du Louvre - Galerie d'Apollon -
Eugène Delacroix : "Apollon terrassant le serpent Python"
Date : 6 avril 2012 - Source : Travail personnel - Auteur : MOSSOT).
14:59 Publié dans La mythologie dans la peinture, Peinture | Tags : eugène delacroix, apollon vainqueur du serpent python, galerie d'apollon au louvre, char et quatre chevaux, déesses, dieux, victoire, iris | Lien permanent | Commentaires (10)
Commentaires
Me trouvant au Louvre au printemps 2005, après avoir arpenté les salles du Département des Antiquités égyptiennes aux fins de poursuivre mon "étude" des pièces exposées dans les différentes vitrines, je décidai de quitter Sully pour pénétrer à Denon, le calendrier des travaux ayant voulu que, quelques mois plus tôt, avait été à nouveau ouverte au public, au premier étage, la salle 66, plus connue sous l'appellation de "Galerie d'Apollon".
Curieux, certes, d'admirer ces chefs d'oeuvre absolus que sont les diamants et les gemmes de la Couronne mais, surtout, de pouvoir considérer d'un oeil neuf, - après cette ixième restauration que nécessitait cette fois l'accumulation de poussière et de suie due à la circulation automobile plus que dense, juste en dessous des fenêtres, sur le quai François Mitterrand -, le décor des lieux, extraordinaire écrin pour ces inestimables trésors de la Monarchie.
L'avez-vous déjà visitée, Améthyste, cette impressionnante galerie qui, pour maints touristes, rappelle vaguement celle des Glaces, à Versailles ?
Avez-vous surtout - ce que trop peu de gens, me semble-t-il, pensent à faire, obnubilés qu'ils sont par la magnificence que recèlent les vitrines -, levé les yeux, non seulement vers les murs environnants mais aussi vers le plafond, l'immense plafond décoré ?
Je le fis en avril 2005. Et vis en son centre, tel que l'avait souhaité Félix Duban, l'architecte commandité par l'Assemblée Nationale - nous sommes alors sous le Second Empire, vers 1848 -, cette oeuvre de Delacroix que vous nous proposez aujourd'hui (malheureusement en trop petit format) : "Apollon vainqueur du serpent Python".
Quand on demande au touriste lambda lequel (ou lesquels) Delacroix il vient voir au Louvre, d'office il répond "La Liberté guidant le peuple" ou, éventuellement, "La mort de Sardanapale".
Personne ou pratiquement personne, ne songe à cette peinture de quelque 60 m² qu'il faudrait presque contempler étendu de tout son long à même le sol, doté de lunettes grossissantes.
Pour suivre l'évolution de ce gigantesque travail, permettez-moi de vous conseiller de lire, pour peu d'euros chez l'un des bouquinistes du quai de Seine, juste sous les fenêtres de la Galerie d'Apollon, le "Journal " (1822-1863) tenu par l'artiste et fort heureusement réédité en 1996 chez Plon.
Vous y découvrirez par exemple, à la date du 10 août 1850, p. 262, qu'il se déplaça jusqu'en nos terres du nord, à Anvers et à Bruxelles pour y rencontrer des Rubens : "Cela me sera utile pour mon plafond", conclut-il !
Un an plus tard, dans une lettre adressée à George Sand, il évoque ce "travail affreux, délicieux", réalisé en atelier, sur une toile destinée à être marouflée par la suite sur le plafond de la galerie.
Et si l'on connaît quelque peu l'oeuvre de Delacroix, l'on se rend compte qu'ici aussi, il décline - comme le fait judicieusement remarquer Vincent Pomarède, Conservateur en chef du Département des Peintures du Louvre dans un article des dossiers de l'Art (n° 120, Juin 2005, p. 35) -, ce thème qui lui est si cher : "le combat du Bien et du Mal, de la lumière contre les ténèbres, des forces de l'esprit contre l'obscurantisme", à côté duquel - ou, pour être plus exact, en dessous duquel - passent s'en y prendre garde de nombreux touristes dont les yeux ne scintillent que grâce aux reflets renvoyés par les bijoux de la Couronne de France ...
Merci,Améthyste, d'avoir ici rendu pour vos lecteurs un peu plus visible cette oeuvre de Delacroix ...
Écrit par : Richard LEJEUNE | 08/10/2012
Merci, Richard, pour votre remarque concernant le format initialement choisi. Je viens d'en trouver un supérieur.
Je reviens au plus tôt poursuivre ma réponse. Veuillez me pardonner cette interruption, mes activités professionnelles m'appelant sans pitié !
Écrit par : Améthyste | 08/10/2012
Je n'ai pas encore visité la Galerie Apollon, mais j'aurais probablement contemplé le plafond en priorité.
J'ai beaucoup apprécié cette citation de Delacroix dans son "Journal", après qu'il ait vu des Rubens à Anvers et à Bruxelles !
La lecture de vos intéressantes observations sur cette fresque m'a incitée à rechercher les oeuvres de Delacroix dont j'ai parlé ainsi que les (modestes) articles déjà écrits par mes soins, sept pour l'instant, et pensant qu'il était temps d'ordonnancer plus clairement ce site, je me suis promis de mettre mon projet à exécution dès la fin de cette semaine.
Merci, Richard, pour vos visites toujours si fructueuses.
Écrit par : Améthyste | 10/10/2012
Voici, enfin, les sept publications déjà parues, ici, sur Eugène Delacroix regroupées sur ces deux pages.
J'espère que la présentation actuelle facilitera la lecture des textes et de leurs précieux commentaires, ainsi que d'éventuelles recherches.
Écrit par : Améthyste | 12/10/2012
Infatigable Delacroix !
Entre 1838 et 1847, Delacroix se consacre déjà à la décoration du Salon du Roi du Palais-Bourbon, ce qui lui permet d’affronter de vastes surfaces ; et à côté, il peint des portraits et diverses toiles orientales. Il travaille ensuite à la décoration du Palais du Luxembourg entre 1840 et 1846, mais aussi - et Richard l'explique si judicieusement - à celle de ce merveilleux plafond central de la Galerie d’Apollon au Louvre ; il se consacre encore à la Chapelle des Saints Anges de Saint-Sulpice !
Infatigable Delacroix !
A son amie George Sand, il dit : « Nous travaillerons jusqu'à l’agonie : que faire d’autre au monde, à moins de se saouler, quand vient le moment où la réalité n’est plus à la hauteur du rêve ? ».
Infatigable ... et incroyable artiste que ce Delacroix !
Écrit par : Jean-Claude | 08/10/2012
Oui, Delacroix ne pouvait vivre sans "cette nécessité d'avoir la fièvre"...
Avant 1833, il voyagea : en Angleterre afin de créer un contact plus proche avec la littérature qu'il aimait (Shakespeare, Byron), en Afrique du Nord qui lui inspira "Les Femmes d'Alger dans leur appartement", tableau aux jeux de lumière raffinés...
Merci, Jean-Claude, pour vos commentaires toujours si riches de nouveaux éléments.
Écrit par : Améthyste | 11/10/2012
"Infatigable et incroyable artiste", écris-tu avec raison, Jean-Claude.
Il n'est que lire - je l'ai souligné hier matin dans un autre article d'Améthyste, consacré aux "Phares" de Baudelaire -, les pages que le poète, fin critique d'art - et ami, ils s'admiraient beaucoup tous les deux - lui consacra dans son oeuvre en prose (Salon de 1846).
Et puisque j'évoque la littérature, dans cet "infatigable et incroyable artiste", il nous faut aussi la considérer : en effet, consubstantiellement à son oeuvre picturale, il entretint une énorme correspondance avec ses amis, dont certains sont devenus des "grands" du siècle ; spicilège de lettres qui, publiées, ne comprend pas moins de cinq volumes ; sans oublier d'ajouter un remarquable et très intéressant "Journal", auquel d'ailleurs j'ai fait référence dans mon précédent commentaire ...
Je m'en voudrais de ne pas souligner aussi - on le sait probablement beaucoup moins - qu'il consacra beaucoup de son temps à la photographie, non pas qu'il en fit, mais qu'il utilisa - sans trop aimer ce nouvel art -, comme matériau préparatoire pour ses dessins et ses tableaux ; notamment de modèles féminins : je pense tout naturellement à son "Odalisque", qu'il peignit à partir d'une photo qu'Eugène Durieu réalisa, sous le regard critique de Delacroix lui-même, d'une actrice de l'époque, Mademoiselle Hamély ...
Enfin, il faut savoir qu'il accepta bizarrement de consacrer du temps à personnellement se prêter au jeu de la pose pour des portraits de lui que réalisèrent de grands noms, comme Nadar ...
"Infatigable et incroyable artiste", écrivais-tu, Jean-Claude ???
Écrit par : Richard LEJEUNE | 09/10/2012
Je ne pense pas me tromper, Richard, en écrivant que, parmi les Lectrices et Lecteurs de ce site lisant certainement avec un immense intérêt vos commentaires, sans oublier que je les étudie littéralement moi-même avec passion, les étudiants en Histoire de l'Art doivent se réjouir des précieux apports que vous offrez si généreusement, vous-même et Jean-Claude !
Je suis admirative en découvrant que cinq volumes furent nécessaires pour recueillir la correspondance de Delacroix avec ses amis !
Et j'apprends aussi avec étonnement qu'il utilisait la photographie comme base pour certaines de ses oeuvres.
Merci encore, Richard.
Écrit par : Améthyste | 11/10/2012
Vous êtes trop aimable Améthyste, vraiment. Mais autorisez-moi à penser que les Étudiants en Histoire de l'Art n'ont nullement besoin de Richard Lejeune pour leur indiquer les rapports de Delacroix avec la photographie naissante ! A fortiori s'ils sont Parisiens !!
Eux, à la différence de nous, vos cousins d'Outre-Quiévrain, savent, parce qu'ils l'ont visité comme j'eus moi-même l'opportunité de le faire, le petit mais bien intéressant Musée Eugène-Delacroix, à quelque cinq ou six cents mètres du Louvre : ils n'ont qu'à traverser la Seine par le Pont des Arts - celui en bois, vous voyez ? -, pour aboutir, quai Conti, devant l'Académie française - ou plus précisément devant l'Institut de France, avec sa célèbre coupole sous laquelle siègent les Académiciens.
Empruntant un court instant le quai Voltaire sur leur droite, ils tournent alors à gauche pour s'engouffrer dans la petite rue Bonaparte (j'insiste : ne voyez pas dans "petite rue" une quelconque allusion métaphorique à la taille du dit général corse !) : là, ils risqueront, ces Étudiants, de me rencontrer dans une réputée librairie d'égyptologie ...
Continuant à remonter cette rue, s'ils sont trop matinaux, ils pourront toujours, avant que le Musée Delacroix de la rue de Furstemberg toute proche ouvre ses portes, choisir de déguster une tasse de café ou un jus d'orange, ce que je fis dernièrement en espérant voir passer - un peu comme dans les films d'Hitchcock - la silhouette du "Maître", qui serait ici germanopratin : Sartre, accompagné de Simone de Beauvoir, soit aux Deux-Magots, soit au Café de Flore ...
Et puis, bien évidemment, entrer dans l'appartement et l'atelier du peintre, devenus musée national qui, par parenthèse, dépend administrativement du Louvre.
Malheureusement, je n'eus pas l'heur de visiter là, au tout début de l'année 2009, ce que je pense, à la lecture du dossier de presse, avoir été une exposition exceptionnelle : "Delacroix et la photographie", préparée en collaboration avec la BNF.
Voici un lien qui vous permettra de lire ce document : http://www.musee-delacroix.fr/IMG/pdf/delacroix_photographie.pdf
En revanche, quand, l'année dernière, je passai quelques heures dans la Galerie Mansart de cette même BNF pour y admirer l'exposition Prisse d'Avennes, je pris conscience de l'importance de l'art photographique qui venait de naître en ce milieu du XIXème siècle pour ce qui concerne, notamment, une première vision des paysages des rives du Nil antique ...
Dans la mesure où ce sujet vous intéresserait, vous et peut-être certains de vos lecteurs, puis-je immodestement vous inviter à venir lire sur mon blog, dans le cadre des articles rendant compte de l'exposition Prisse d'Avennes, celui que je dédiai le 1er octobre 2011 à la photographie ?
Cette photographie qui intéressa au plus haut point - même s'il n'était pas persuadé de son bien-fondé -, Eugène Delacroix.
Ce que le dossier de presse fourni grâce au lien ci-dessus vous expliquera, ainsi qu'aux Etudiants d'Histoire de l'art, bien mieux que Richard Lejeune en personne ...
Écrit par : Richard LEJEUNE | 11/10/2012
Merci, Richard, pour cette promenade dans ce célèbre quartier parisien.
J'ai suivi le lien que vous avez indiqué conduisant à l'exposition au Musée national Eugène Delacroix et j'ai relevé, entre autres, cette réflexion quasi effrayante de Delacroix (son "Journal" de 1824) : "Je me vis dans une glace et je me fis presque peur de la méchanceté de mes traits... [les muses] ont été pires que des courtisanes." (Extrait de "Delacroix photographié" - Parcours de l'exposition).
Mais j'y retourne après cette salutation matinale et dominicale à vous-même ainsi qu'à tous nos lecteurs.
Écrit par : Améthyste | 14/10/2012
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